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à un de ses camarades de collége, au duc de D***. je la traduis ici presqu'en entier.

<< Cher D-r-t! Tes premiers pas ont erré avec moi sous l'ombrage du Mont Ida. Toi que ma tendresse m'apprit à défendre, et dont je fus l'ami, et non pas le tyran, malgré les lois de notre république qui t'ordonnaient d'obéir, et à moi de commander..... dans peu d'années, le sort amassera sur ta tête le don des richesses et l'orgueil du pouvoir. Dès à présent tu portes un nom illustre, renommé dans l'histoire, et peu distant du trône. Mais que ces vains dehors ne séduisent pas ton âme, et quand ton précepteur, passif, craignant de s'attirer la haine de l'enfant titré dont le souffle peut l'élever un jour, verrait tes erreurs d'un œil indulgent; quand il encouragerait les défauts

D--r-t! whose early steps with mine have stray'd,
Exploring every path of Ida's glade,
Whom, still, affection taught me to defend,
And made me less a tyrant than a friend;
Tho' the harsh custom of our youthful band
Bade thee obey, and gave me to command
Thee, on whose head a few short years will shower
The gift of riches and the pride of power;
Even now a name illustrious is thine own,
Renown'd in rank, not far beneath the throne.
Yet, D-r-t, let not this seduce thy soul,
To shun fair science, or evade controul;
Tho' passive tutors, fearful to dispraise

qu'il n'ose châtier, je t'en supplie ne fuis pas les sciences, ne te révolte pas contre un frein salutaire. <<Lorsque de jeunes parasites plieront le genou devant la richesse, leur idole, non devant toi; car, dès la simple et candide adolescence, on trouve des esclaves prêts à flatter et à ramper: quand ils te diront que « la pompe doit entourer celui que sa naissance appelle aux grandeurs; que les livres ne furent écrits que pour amuser des rêveurs ou des insensés ; que les esprits supérieurs dédaignent les règles ordinaires, >> ne les crois pas! Ils montrent le sentier qui conduit à la honte; ils cherchent à ternir l'honneur de ton beau nom. Alors, tourne-toi vers ceux des compagnons de ton enfance dont l'âme ne craint pas de con

The titled child, whose future breath may raise,
View ducal errors with indulgent eyes,
And wink at faults they tremble to chastise.

When youthful parasites, who bend the knee
To wealth, their golden idol, not to thee!
And, even in simple boyhood's opening dawn,
Some slaves are found to flatter and to fawn:
When these declare : << That pomp alone should wait
<< On one by birth predestin'd to be great;
« That books were only meant for drudging fools,
<< That gallant spirits scorn the common rules. >>
Believe them not, -they point the path to shame,
And seek to blast the honours of thy name:
Turn to the few, in Ida's early throng,
Whose souls disdain not to condemn the wrong;

damner le mal; et si, parmi eux, il ne s'en trouvait pas un qui osât te faire entendre la voix impérieuse de la vérité, demande-la à ton cœur, il t'avertira du danger; car, je le sais, la vertu y réside.

« Oui, j'ai veillé sur toi pendant bien des jours. Mais à présent de nouveaux soins m'appellent. Oui, j'ai vu que ton âme généreuse était formée pour le bonheur du genre humain. Ah! quoique moi-même je sois d'un naturel hautain, bizarre, impétueux, dominé par le caprice, la proie de mille erreurs qui préparent ma chute, je voudrais tomber seul. Quoiqu'aucun précepte ne puisse maintenant dompter mon cœur altier, j'aime les vertus que je ne pratique pas.

Or, if amidst the comrades of thy youth,
None dare to raise the sterner voice of truth,
Ask thine own heart! 'twill bid thee, boy, forbear,
For well I know, that virtue lingers there.

Yes! I have mark'd thee many a passing day,
But, now new scenes invite me far away;
Yes! I have mark'd, within that generous mind,
A soul, if well matur'd, to bless mankind;
Ah! thơ, myself, by nature haughty, wild,
Whom Indiscretion hail'd her favourite child;
Thơ ev'ry error stamps me for her own,
And dooms my fall, I fain would fall alone;
Tho' my proud heart no precept, now, can tame,
I love the virtues which I cannot claim.

'Tis not enough with other sons of power, To gleam the lambent meteor of an hour,

1

<< Non, ce n'est point assez de briller confondu avec les enfans du pouvoir, comme un météore qui passe et s'évanouit; d'enfler les annales de la noblesse de vains noms qu'on ne retrouve plus ailleurs; de partager avec la foule titrée le sort commun; d'être dans cette vie un moment entrevu, oublié dans le tombeau. Là, rien ne te séparera du vulgaire, si ce n'est la pierre glacée qui pèsera sur ta tête, l'écusson tombant en poudre, ou le parchemin du héraut-d'armes. Les grands qui meurent sans gloire n'ont trouvé que la tombe pour transmettre au monde, après eux, un nom méprisé. Là dorment, inaperçus comme les voûtes sépulchrales qui cachent leur poussière, leurs folies et leurs fautes, une longue suite d'aïeux recouverts d'armoiries destinées à n'être jamais lues. Ah! que ne puis-je te voir d'un

To swell some peerage page in feeble pride,
With long-drawn names, that grace no page beside;
Then share with titled crowds the common lot,
In life just gaz'd at, in the grave forgot;
While nought divides thee from the vulgar dead,
Except the dull cold stone that hides thy head,
The mouldering 'scutcheon, or the herald's roll,
That well-emblazon'd, but neglected scroll,
Where lords, unhonour'd, in the tomb may find
One spot to leave a worthless name behind;
There sleep, unnotic'd as the gloomy vaults,
That veil their dust, their follies, and their faults;
A race, with old armorial lists o'erspread,
In records, destin'd never to be read.

œil prophétique, parmi les sages et les hommes vertueux, parcourir une longue et glorieuse carrière! Le premier par ton rang, par tes vertus, par ton génie, foulant aux pieds les vices, exempt de toute bassesse, non le favori de la fortune, mais le plus noble de ses fils! » (*)

Un pareil langage, dans la bouche d'un jeune homme de dix-neuf ans, n'annonçait pas une âme commune. Il était d'ailleurs facile de reconnaître, dans l'ensemble de ces poésies, un être qui aspirait à de hautes destinées et qui déjà ne faisait plus partie de la foule: on y rencontre à chaque page des promesses de gloire pour l'avenir. Qui ne serait ému du pressentiment d'immortalité que renferment ces vers, datés de 1803? Lord Byron avait alors quinze ans.

Fain would I view thee, with prophetic eyes,
Exalted more among the good and wise;
A glorious and a long career pursue,
As first in rank, the first in talent too;
Spurn every vice, each little meanness shun,
Not Fortune's minion, but her noblest son! (*)

(*) Cette pièce de vers n'avait encore jamais été traduite en français,

non plus que le fragment cité à la page suivante.

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